que du bonheur - partie III
Nous tous qui cherchons, à l’intérieur ou à l’extérieur, un bonheur plus durable autocentré (si je m’insère dans la logique de l'article), ne serions plus volontaire pour se retrousser les manches et changer les choses qui ne vont pas dans la société actuelle ?
Comment changer le monde si l’on ne sait déjà pas comment sauver sa peau et qu’on n’a pas l’impression d’avoir la main sur sa vie ?
D’autre part, est-ce que je peux m’éloigner du monde alors que je baigne dans son bain ? J’ai moi-même cette tendance là, mais je n’arrive pas au point de non-retour parmi les miens ! Et, je trouve toujours à m’indigner.
Bien-sûr je voudrais vivre dans un autre type de monde ! Et je sais très bien que son « avènement » ne se fera pas sans moi. En toute humilité et par de petits gestes, chacun a sa part à faire. Mais si je veux changer le monde, tant que je n’ai pas déterré et accepté mes zones d’ombre pour les réhabiliter avec bienveillance et tendresse à une plus juste place ; tant que je ne me rends pas compte que la blessure d’avoir été spolié, rabaissé, humilié, secoué, trahi… est à l’origine du mal que je cause, je bafouerai la dignité.
Acquiescer n’est pas renoncer, se résoudre à, se résigner à vivre en-dessous de moi-même, mais si je dois accueillir mes travers et ma médiocrité, ma dualité bourreau/victime, c’est dans le seul but d’ouvrir la porte à l’altérité.
Je vis dans cette société, je suis la société… Il n’y a nulle part ailleurs où aller. Je suis coincée dans une époque, dans un corps donné qui vit dans un type de société donnée. Condition sinequanone pour accepter le monde tel qu’il est, c’est pour moi, et de la part des autres, m’accepter comme je suis.
En fait, les personnes qui se tournent vers le développement personnel, et les personnes qui veulent sauver le monde veulent la même chose : que les cris de violence et de souffrance s'arrêtent. Nous sommes tous un maillon d’une chaine de violence et de fraternité à la fois. Pour mettre plus de lumière, accorder une possibilité au bonheur de s’actualiser plus souvent, il faut d’abord être en mesure de changer cette chaîne de violence, perpétuée envers nous-même par nous-même, avant de vouloir l’abroger chez l’autre. Etablir en nous assez de force et de courage, d’amour pour se mettre en travers de cette violence, et ne plus se laisser ébranler par elle et par la peur. Je suis à ma place dans tous les cercles de la vie, et j’ai un droit fondamental d’existence sur tous les plans : physique (matériel, corporel), culturel, intellectuel, émotionnel, psychique, spirituel.
Véronique Mahieu
30 novembre 2019
Illustration : Pixabay
Ma réaction au thème de « La tyrannie du bonheur au service du capitalisme 11/10/2018 " (présenté dans Les Nouvelles de l'éco par Arjuna Andrade) qui interroge le bonheur : "Dans leur ouvrage "Happycratie", la sociologue Eva Illouz et le psychologue Edgar Cabanas interrogent la place ambiguë qu’occupe le bonheur dans nos sociétés modernes."
- (https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-de-leco/les-nouvelles-de-leco-du-jeudi-11-octobre-2018?utm_medium=Social&utm_source=Facebook&fbclid=IwAR0gmfL4mAzIqa8v7iApwyaIGB9P2iHl_IWc-hX8aQz8U3g1kZYUAjaU1Io#Echobox=1574400698)
- Référence au livre Happycratie, d’Eva Illouz et Edgar Cabanas
Mots clés :